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Asalaam alaykum,

 

Je t'avais écris via ton site, il y'a quelques jours, ou semaines, mais je ne pense pas que le message soit passé (je n'ai pas reçu une copie de mon message, et sur ton site il y avait indiqué « erreur », mais j'étais trop paresseuse pour réécrire). Je vais essayer de reprendre le plus important du contenu de ce message. Ah oui, déjà c'est Hayet, la sœur qui suivait tes cours, il y a bien longtemps... J'espère que tu vas très bien, en bonne santé, et porté par ta foi, par la grâce d'Allah. Je travaille encore sur le fisal d'Ibn Hazm. Je n'étais pas prête à rendre mon mémoire l'année dernière, j'espère pouvoir valider cette année. J'ai un gros problème de constance dans mon travail, franchement ce n’est pas digne, et surtout quand je vois tous ces écrits d'orientalistes qui ne chôment pas. Qu'Allah me pardonne, et m'accorde d'être plus rigoureuse dans mes études. Je suis retombée sur ton essai sur l'école zahirite, et subhanAllah ! J'ai réalisé et compris que tu disais dans le premier paragraphe que tu avais embrassé cette école. C'est fou que je ne l’aie pas vu en le lisant l'année dernière. Je voulais te poser une question relative au voyage de la femme. J'envisageais de faire une Umrah ce Ramadan, je n'ai aucun mahram pour m'accompagner. Seulement, j'aimerai savoir quelles sont les conditions du voyage de la femme, lorsqu'elle est seule. Est-ce strictement interdit ? Existent-ils des exceptions (travail, science, voyage pour une noble cause) ? Je suis perdue, je candidate pour une année d'assistanat en Angleterre l'an prochain, ce qui implique que je serai seule. Une réalité, les mahram qui sont nôtres ne partagent pas forcément nos ambitions... Alhamdulillah... Enfin, je sais que tu es super occupé, mais si tu as un petit moment, jazakAllah kheir de m'éclairer. Wasalaams, Fraternellement,
Hayet

 

Wa ahléikou salam orti al 'aziza,

 

Il est vrai que je ne reçois pas toujours les messages qu’on me destine, et je ne sais pas non plus avec certitude si mes réponses arrivent à destination. L’idéal est, de toute évidence, la communication réelle de proximité car avec les moyens modernes de communication, n’importe quel ennemi initié ou hacker expérimenté peut obstruer à une correspondance via le web, utile à l’Islam et à la communauté. Rien ne serait plus facile pour une personne qui désire nuire ou empêcher une action militante comme une manifestation par exemple, que de couper la liaison entre les organisateurs et les participants, sans que ces derniers ne s’en rendent compte… Ainsi, le musulman doit persévérer dans sa volonté de joindre une personne, et ce, jusqu’au retour confirmant l’arrivée du message à destination, sans sombrer toutefois dans la paranoïa bien évidemment…

 

Cela dit, cela fait plaisir d’avoir des nouvelles de celle qui a donné son nom à l’association Hayat et qui fut l’une de mes premières élèves, soit il y a une dizaine d’années. Je ne cesse de t’embêter avec cela me diras-tu ? C’est que j’ai le sens de ne jamais oublier, voire de me remémorer parfois, les personnes marquantes qui ont partagé, dans l’action, mon parcours...  

 

Concernant ta question sur l’interdiction du voyage d’une femme sans mahram ? Et les exceptions à cette dernière, sache qu’il existe trois principaux avis concernant cette question :

-          L’interdiction absolue

-          L’interdiction avec exception

-          L’interdiction relative au contexte

 

Le premier avis est celui de ceux qui se basent sur le hadith authentique suivant : « Il n’est pas permis à une femme de voyager seule sans mahram. » Plusieurs traditions vont dans ce sens mais avec des variantes sur la durée permettant de définir le départ de l’interdiction soit : « au dessus de trois », « de deux nuits », « d’un jour et d’une nuit » ou « d’une journée »…     

 

Le second avis est celui de ceux qui donnent des exceptions à cette interdiction comme le voyage à la Mecque. C’est l’avis d’Ibn Hazm qui considère l’obligation du Haj et de la ‘Omra autant pour l’homme, que pour la femme, que cette dernière possède un marham ou pas. Il s’appuie sur le verset du Coran qui est général concernant l’ordre d’accomplir le pèlerinage et sur le hadith dans lequel le Prophète a dit : « Une femme ne doit voyager qu’avec un Mahram et un homme ne doit pas s’isoler avec une femme. » Un homme dit : « Ô Messager d’Allah, ma femme est partie faire le haj et moi j’avais prévu de sortir pour le combat. » Il dit : « Vas au Hajj avec elle. »[1] Selon Ibn Hazm, le Prophète n’a pas ordonné le retour de cette femme, ni n’a critiqué son voyage, impliquant la validité de ce dernier car il ne peut pas, effectivement, fermer les yeux sur une transgression. Le Prophète n’a donné un ordre qu’à l’homme afin qu’il accompagne son épouse, indiquant que le péché ne concerne ici, que l’homme s’il laisse sa femme voyager seule, quand il peut l’accompagner. Ibn Hazm s’appuie aussi sur la parole du Prophète : « Si vos femmes vous demandent la permission d’aller à la mosquée, alors donnez-leur l’autorisation. » Dans une autre tradition authentique : « N’interdisez pas vos femmes d’aller à la mosquée. » Et, effectivement, le voyage en vue d’aller à la Mecque n’est autre qu’un voyage en vue d’aller à une mosquée, et pas n’importe laquelle puisque c’est la mosquée sacrée ! Pour Ibn Hazm, il existe un voyage obligatoire et un voyage qui n’est pas obligatoire et le Haj est un voyage obligatoire qui implique l’exception concernant l’interdiction pour une femme de voyager seule.

 

Le troisième avis est celui de ceux qui pensent que l’interdiction est liée à un contexte d’insécurité et que lorsque la sécurité est assurée alors la femme peut voyager sans mahram tant qu’elle est accompagnée par un groupe de gens de confiance. Les tenants de cet avis s’appuient sur le hadith dans lequel Abdi Ibn Hatim a dit : «J'étais chez le Messager de Dieu et un homme est venu chez lui se plaindre de la pauvreté, puis un autre homme est venu se plaindre de l'insécurité du chemin. Alors le Prophète a dit : «'Abdi, as-tu vu AI Hayra (un village près de AI koufa)? «J'ai dit: je ne l'ai pas vu mais j'en ai entendu parler.» Il dit : «Si tu vis longtemps, tu auras la chance de voir les palanquins partir en voyage de AI hayra et faire le tour de la Ka'ba, ne craignant rien sauf Dieu.»[2] C’est pourquoi, Omar a envoyé les veuves du Prophète faire le pèlerinage en groupe, accompagnées de Othman et de Abdel Rahman Ibn ‘Aouf. D’autres parts, Ibn Taymiyya affirme de son côté que le pèlerinage de la femme qui n’a pas trouvé de mahram, et qui a voyagé seule est accepté.  

 

Je t’ai exposé les trois principaux avis sur le sujet sachant que l’on peut ajouter plusieurs autres facteurs pouvant influer sur la motivation et la permission du voyage pour une femme sans mahram, sur la base du principe de moindre mal, parmi lesquels :

-          La finalité du voyage

-          La nature de l’être de la voyageuse

-          La forme de l’accompagnement

-          Le contexte de résidence

-          Le climat familial

-          Le principe de nécessité

 

En effet, un voyage dont la finalité n’est pas légale religieusement parlant est interdit, à la différence des voyages qui peuvent trouver une justification dans la loi comme la quête de la science, la hijra, ou le fait de quitter des contextes à risque comme la guerre ou la crise. Il faut aussi tenir compte de la nature de la personne qui voyage car une personne suiveuse et donc influençable risque de se pervertir car la solitude loin de la demeure de résidence est une voie satanique qui peut mener vers l’impudicité et la perversion, d’où la nécessité de s’assurer aussi du degré de piété des compagnons de voyage car un voyage mixte, par exemple, avec des personnes perverses est une aubaine pour Satan afin de les mener à l’accomplissement de péchés ! Dans le prolongement, il faut aussi regarder si le contexte de résidence est sain car voyager pour atterrir dans un endroit à risque est interdit car la résidence seule est tout aussi interdite que le voyage seul car Ibn 'Umar a déclaré[3] que le Prophète : « a interdit à un homme de passer la nuit seul ou de  voyager seul ». Il faut aussi regarder les avantages et les inconvénients des situations car une femme seule en terre d’Islam n’est pas équivalente à une femme seule en terre de mécréance ! C’est pourquoi, les sœurs vivant dans des foyers où priment la mécréance, le chirk, l’ignorance et l’injustice sont plus en droit de quitter leur famille et leur foyer que les autres afin d’assurer leur épanouissement religieux. Sans oublier l’unanimité des savants sur la levée de l’interdiction de voyager sans mahram pour une femme dans le cas de nécessité !

 

Wa bilahi ta’ala taoufiq

Mahdy Ibn Salah

 



[1] Boukhari, Moslim
[2] Boukhari
[3] Ahmad
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