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Written by Mahdy Ibn Salah  •  Category: Maqdissisme  •   •  Hits: 21624

 

 
Salam aleykoum wa rahmathullahi wa barakathou 



J'ai entendu dire par un sheikh tel que : Imran Hosein et d'autres individus que voter dans un pays tel que la France qui ne reconnait pas l'autorité de Dieu et ses lois revenait à du Shirk. Je voudrai donc savoir si cela est vrai et quel est le Dalil, afin de savoir si je dois voter pour les élections présidentielles, et savoir si je pouvais voter blanc.


Merci 

Salam

 

Wa ahleikoum salam,

 

La problématique est claire, elle repose sur la question suivante : est-ce que voter est du chirk ? La réponse l’est moins, puisque la communauté est partagée vis-à-vis de cette question, bien que la majorité des savants penchent pour la permission du vote. Si la réponse n’est pas claire, c’est que nous avons à faire à une question équivoque et c’est toujours à partir de l’équivoque que les sectes ont vu le jour dans notre histoire comme le révèle ce verset du coran : « C’est Lui qui a fait descendre sur toi le livre ; il s’y trouve des versets sans équivoque, qui sont à la base de livre, et d’autres versets qui peuvent prêter à des interprétations diverses. Les gens, donc qui ont au cœur une inclinaison vers l’égarement, mettent l’accent sur les versets à équivoque, cherchant la dissension… »[1] Ainsi, prendre position radicalement sur une question où la communauté est partagée, et ce de manière légitime c’est-à-dire quand la divergence est tolérable, c’est en quelque sorte semer la dissension, puisqu’une telle attitude est un obstacle patent à la réalisation de l’unité de la communauté, au point où de part le passé les membres d’une école de droit interdisaient le mariage avec les membres d’une autre école de droit !

 

Il est donc important de retenir la règle fondamentale suivante ; le sage ne prend jamais une posture radicale au sujet d’une question où la divergence est légitime… En effet, tous les sectaires partagent la caractéristique de faire abstraction des références et de la méthodologie des autres, et de les juger par rapport à leur propre conception des choses, qui, quant à elle, est souvent erronée en raison de leur étroitesse d’esprit.

 

Il s’agit ici d’une question de chirk, impliquant, par conséquent, une divergence au niveau de l’excommunication ou pas de celui qui participe ou légitime la participation aux élections ! C’est pourquoi, cette question est importante car si la réponse à cette dernière n’est pas partagée d’un commun accord, alors elle ne pourra, et ce de toute évidence, réunir les membres de la communauté ! En effet, il ne peut pas y avoir d’unité au sein d’un groupe où les uns excommunient, et les autres pas, une même personne !

 

Cela dit, les deux principales critiques de ceux qui soutiennent que le vote est du chirk reposent respectivement sur le dogme et la voie:

  -   Le premier consiste à accorder à une créature un pouvoir législatif absolu par l’action de voter quand celui-ci n’appartient qu’à Allah

   -      Le second concerne l’usage d’un système démocratique, pour la réalisation collective du Tawhid quand le prophète n’a pas usé de cette voie

 

Il est important de revenir à la notion du pouvoir législatif puisque c'est sur ce pouvoir qui repose toute la problématique car les tenants de l’avis extrémiste, parmi lesquels se trouvent en premier plan les khawaridjs, considèrent que celui-ci est la propriété exclusive d'Allah en se basant sur la parole divine: « Le jugement n'appartient qu'à Allah »[2] Dans un autre verset du coran, Allah dit: « Et ceux qui ne jugent pas d'après ce qu'Allah a fait descendre ceux-là sont les mécréants! »[3] A partir de ce dernier verset, ils excommunient tous les musulmans qui reviennent au niveau législatif à une loi étrangère à la Shari'a ou qui participe à un système démocratique.

 

La question capitale qui se pose à présent est: le domaine législatif appartient-il entièrement à Allah? La réponse se trouve dans le même verset qu'utilisent ceux qui excommunient car Allah attribue l'acte de juger aussi à l'homme. En effet, un autre verset appuie notre thèse: « Et juge parmi eux d'après ce qu'Allah a fait descendre. »[4] Donc le jugement est humain mais la base de celui-ci doit être divine. C'est pourquoi, Allah attribue le qualificatif de « juge » (hakaman) à des hommes pour reprendre un argument d'Ibn Abbas contre les khawaridjs: « Si vous craignez le désaccord entre les deux [époux], envoyez alors un arbitre (un juge) de sa famille à lui, et un arbitre (un juge) de sa famille à elle. Si les deux veulent la réconciliation, Allah rétablira l'entente entre eux. »[5] Il est donc important de bien traduire le sens du terme « hukm »! Fait-il référence exclusivement au pouvoir législatif c'est-à-dire le pouvoir de faire et de défaire des lois ou inclue-t-il aussi le pouvoir judiciaire, c’est-à-dire celui de trancher entre différents partis ?

 

Ceux qui confondent ces deux pouvoirs commettent une grave erreur ! Ils font partie des khawaridjs, et il est inutile de discuter avec ce genre de personnes pour qui les mots ont simultanément plusieurs significations contraires ! Ainsi, le pouvoir législatif n’est pas entièrement réservé à Allah dans la mesure où le gouverneur peut décider selon les circonstances de l’application d’une loi ou pas, voire même peut en élaborer une comme ce fut le cas pour les coups de fouets concernant l’ivresse qui est une loi ne reposant ni un verset, ni sur un hadith.

 

Poursuivons pour ceux qui ont l’intelligence de faire la part des choses entre les différentes significations que peut prendre un terme et qui peuvent le comprendre relativement à son contexte. A partir de là, il est évident que la démocratie occidentale qui octroie au peuple ou aux députés le pouvoir de faire et de défaire des lois sur une autre base que divine ou contre cette même base est contraire à l'essence même de l'islam et implique l'excommunication de celui qui légitime un tel système organisationnel pour l'islam ou le considère meilleur que ce dernier car il y a bien ici un rabaissement de la parole d’Allah !

 

Cependant le caractère associateur du système démocratique[6] occidental n'implique pas nécessairement l'excommunication de celui qui y participe. En effet, la participation par laquelle l'intention n'est pas l'octroi absolu du pouvoir législatif au peuple ou à son autorité, mais vise uniquement l'accès à l'autorité ou l’influence sur cette dernière afin justement d'améliorer le système et la situation des musulmans, alors cette participation est permise tant qu'elle n'implique aucunement une négation des principes de la foi musulmane, ni une reconnaissance doctrinale du système idolâtre, même si elle peut nous contraindre à faire des concessions stratégiques. Cette attitude est puisée, en effet, de la voie prophétique quand notre prophète, lors du pacte de Houdaybiyya avec les associateurs, fit des concessions en vue d’un intérêt à long terme pour l’islam et les musulmans…

 

A partir de là, voter n’implique pas nécessairement le fait d’accorder un pouvoir législatif à une créature. Surtout quand voter est un acte, car voter, c’est choisir, c’est prendre parti, et prendre parti est permis si nous avons à choisir entre deux mécréants. Et la preuve se trouve dans le coran : « Les Byzantins ont été vaincus, dans la contrée voisine, et après leur défaite, ils seront les vainqueurs, dans quelques années. »[7] En effet, les mecquois associateurs se réjouirent de la défaite des byzantins, gens du livre, proche du monothéisme contre les perses adorateurs du feu. Et c'est pourquoi, le prophète et les croyants furent heureux de la révélation de ce verset et prirent le parti des byzantins dans leur conflit qui les opposa aux Perses.

 

Les partisans de l’excommunication de celui qui vote commettent, par déduction, une autre grossière erreur consécutivement à leur étroitesse d’esprit, celle de confondre l’action de voter avec la croyance d’accorder un pouvoir législatif à une créature. Ainsi, on peut voter tout en n’accordant aucun pouvoir législatif à une créature, si par notre action nous ne faisons que prendre parti pour le moins pire afin d’améliorer la situation des musulmans.

 

Il est important aussi de mettre en relief ici le concept de Koufr de fond et de Koufr de forme car, en effet, un acte de mécréance n’implique pas toujours l’excommunication de celui qui le commet comme le révèle le récit authentique où celui qui sous l’intensité de la joie dit à Allah: « Tu es mon serviteur et je suis ton seigneur ! » Il est clair que cette parole est de la mécréance mais les circonstances de son émission nous permettent d’opérer une fracture entre la forme et le fond de cette parole afin de ne pas tenir compte de la portée de la forme. Il en va de même des circonstances des musulmans de France qui peuvent commettre, par conséquent, un acte de chirk dans la forme mais pas dans son fond. Et pour excommunier quelqu’un, en ce qui concerne cette question, il est indispensable que les deux koufr soient réunit, soit le fait d’associer à l’acte de voter, la reconnaissance de la supériorité du système idolâtre sur le système authentique qu’est l’Etat islamique reposant, quant à lui, sur le Coran et la Sunna!

 

Là encore, les égarés seront ceux qui confondent les deux koufr et excommunieront directement celui qui commet un koufr de forme sans chercher à comprendre la circonstance de son accomplissement !

 

Je viens de te citer trois confusions dans laquelle sont tombés des membres de notre communauté que je considère par ailleurs comme des égarés car la question du Takfir ne doit pas être prise à la légère :

 

-          la confusion dans la signification du terme « hukm »

-          la confusion entre l’action de voter et celle d’accorder un pouvoir législatif

-          la confusion entre le koufr de forme et le koufr de fond

 

Et je pense que ces trois confusions seront suffisantes pour te permettre de faire la part des choses entre les tenants des avis pour ou contre le vote car sans confusion la permission du vote devient, effectivement, évidente !

Les maqdissites considèrent l’action de voter comme une entrave à la réalisation du Tawhid, c’est pourquoi ils n’acceptent pas de « maslaha » (principe de l’intérêt général ou du moindre mal) en ce qui concerne cette question. Or, voter est un acte qui n’implique pas nécessairement la reconnaissance d’un associé à Allah ! D’où mon devoir d’apporter des précisions…

J’aimerai m’attarder, avant de clôturer la discussion, sur la contradiction des partisans de l’excommunication de celui qui vote car les égarés sont toujours contradictoires comme les khawaridjs d’autant qui étaient sévères à l’égard des croyants et doux à l’égard des vrais mécréants! Ils voient, effectivement, le chirk dans l’action de voter mais ne voient pas le koufr de renforcer un système idolâtre par leur résidence, ne serait-ce que par l’achat de leur pain quotidien dans lequel se trouve une taxe qui finance un pays en guerre contre leur coreligionnaire ? Voter stratégiquement est, de toute évidence, moins nuisible pour les musulmans que la contribution financière à un système idolâtre ! Mais eux ne s’arrêtent qu’à cette question…

 

C’est pourquoi ma sœur je n’aime pas les gens qui focalisent sur ce sujet, et d’ailleurs, si tu veux savoir, je ne vote pas, non parce que je considère l’action interdite mais tout simplement parce que je ne vois pas mon avenir en France et que la voie démocratique n’est pas, selon moi, la voie de la réalisation du but ! Je défends un avis que je ne pratique pas de manière impartiale sans rendre l’acte obligatoire, ni interdit afin de te montrer la posture médiane qu’il faut toujours adopter ! Mais je tiens à te souligner que je n’aime pas le sectarisme de ceux qui se rangent d’un côté et taxent d’égarés les autres pour une question où la divergence est tolérable ! Je les aime encore moins quand ils se déplacent rapidement de la question du Tawhid à celle du Takfir, de sorte qu’ils deviennent, en quelque sorte, des khawaridjs cachés[8], c’est-à-dire de fond mais pas de forme !

 

Mahdy Ibn Salah

 



[1] C3/7

[2] C12/40

[3] C5/44

[4] C5/49

[5] C4/35

[6] Signalons qu’il existe différentes formes de démocratie, plus au moins tolérable, en fonction de la nature et des limites du « pouvoir » octroyé à une créature, ainsi que de l'entièreté ou de la fraction de la participation de la population à celui-ci.

[7] C30/02

[8] Quand le discours est soigné de sorte qu’il ne contient pas d’erreurs mais quand l’âme du discours contient la même illusion que les premiers khawaridjs c’est-à-dire une prétention et une arrogance, même associée à une sincérité relative à l’ego, alors il ne nous reste plus que la manière d’agencer les idées et les actes pour les confondre. Et combien ces gens manquent de sagesse ! On reconnait effectivement un arbre à ses fruits…

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