Le débat, qui concerne les attributs divins des versets et récits équivoques, a vu le jour a l'aube de l'Islam, et continue d'engendrer des disputes et de faire couler de l'encre et du sang, malheureusement, aujourd'hui. La divergence n'a cessé de miner notre communauté de par le passé et ne cessera de le faire dans le futur car l'homme juge naturellement par rapport à son repère de pensée, élaboré par un cheminement propre. Or, nous sommes tous différents, de par nos parcours, nos capacités d'entendement, et nos environnements. Ainsi, chercher à unifier la communauté est vain en l'absence de la source unificatrice, par excellence, qu'est le prophète. C'est d'ailleurs l'une des fonctions de la prophétie que de générer l'unité dans la communauté. C'est pourquoi revenir à Allah et au prophète est un signe de la foi pour ceux qui se disputent comme le confirme un verset coranique : « Si vous vous disputez en quelque chose, renvoyez-la à Allah et à son prophète si croyez en Allah et au jour dernier. Cela sera bien mieux et de meilleure interprétation. » Cependant toutes les questions n'engendrent pas l'unité. Il y en a certaines où la divergence est permise et d'autres où celle-ci est interdite puisque engendrant de la dislocation du groupe. C'est pourquoi, il faut revenir au repère prophétique en toute chose, pour savoir si une question est ouverte au débat ou non. Posons le sujet du débat :
Il s'agit des attributs par lesquels Dieu se décrit dans la révélation coranique et prophétique comme « la main, le pieds, la descente, la jalousie de Dieu... » Faut-ils les prendre littéralement, métaphoriquement, les nier ou s'en remettre à Dieu concernant leurs significations ?
Car il est question ici de lever la contradiction entre le verset : « Rien n'est tel que Lui » et les nombreux versets et récits qui décrivent Dieu avec des attributs présentant une ressemblance nominale. Voilà, exposés les principaux courants concernant cette question. Chacun des partisans de ces courants respectifs condamnent voire excommunient les autres car jugeant à travers leur repère, pour une question qu'ils considèrent comme faisant partie de la croyance où la divergence n'est donc pas permise. Les uns considèrent ceux qui lisent les versets et récits équivoques littéralement comme des anthropomorphistes et, par conséquent, les excommunient car selon eux, cela revient à donner le corps à Dieu et donc à renier sa toute perfection. Les autres accusent les partisans de l'interprétation des versets et récits équivoques de remettre en cause le parachèvement de la religion et de semer la discorde par la focalisation sur un point qu'il faut sagement délaisser. On peut partager ces courants en deux, en fonction des deux vues par lesquelles, on peut aborder ces attributs divins. En effet, soit on lit les versets et récits équivoques à travers une vue relative c'est-à-dire humaine, soit on les lit à travers une vue absolue c'est-à-dire divine.
-
Ceux qui lisent les versets et les récits équivoques à travers une vue relative commettent une erreur grossière, celle de chercher à comprendre la parole du Créateur à travers la vue d'une créature. La grossièreté de l'erreur provient du fait qu'il est hautain de vouloir comprendre une parole infinie à travers un repère relatif donc fini car cette attitude mènera à l'altération de la parole infinie en vue de lever les contradictions qui résulteront de cette lecture relative. Le caractère hautain de cette lecture provient du fait que le récepteur se normalise dans la signification de la parole de l'émetteur, surtout quand celui-ci est Allah ! La quasi-totalité des courants sont nés de cette lecture, les uns ont nié les attributs par lesquels Allah s'est décrit, et les autres ont interprété pour ne pas rentrer dans la catégorie des négateurs, et certains se sont remis à Dieu en ce qui concerne la signification. Ainsi, par exemple, pour ces courants l'attribut « la main (yad) » de Dieu présent dans le Coran est à renier ou à interpréter car pour eux le sens du mot main est avant tout une main humaine puisqu'ils se normalisent dans la lecture du Coran.
-
Quant à ceux qui lisent les versets et les récits équivoques à travers une vue absolue c'est-à-dire divine se contentent de la littéralité et normalisent la parole de Dieu dans le sens des attributs divins, présents dans les versets et les récits équivoques. Ainsi, pour les gens de cette catégorie, l'attribut de « la main (yad) » de Dieu est à prendre littéralement car pour eux il existe « une main archétype parfaite » qui constitue la norme de la signification du mot « main » et notre main humaine, elle, n'est qu'une copie finie de cette main archétype. Pour cette catégorie le sens des attributs revient à Dieu et c'est Dieu qui fixe le sens des termes qu'il emploie dans sa parole. Ainsi, ces gens ne déforment pas la littéralité du texte coranique et prophétique et reconnaissent à Dieu ses nombreux attributs par lesquels il s'est décrit dans la révélation et qui présentent uniquement une ressemblance nominale car il n'y a aucune commune mesure entre le fini et l'infini.
Voilà, les deux attitudes en ce qui concerne cette question. Vous en conclurez que seule la seconde est correcte puisque confirmée par le verset : « C'est Lui qui a fait descendre sur toi le Livre, il s'y trouve des versets sans équivoque, qui sont la base du livre et d'autres versets qui peuvent prêter à d'interprétations diverses. Les gens qui ont au cœur une inclination à l'égarement, mettent l'accent sur les versets à équivoque, cherchant la dissension en essayant de leur trouver une interprétation, alors que nul n'en connait l'interprétation, à part Allah. Mais ceux qui sont enracinés dans la science disent : « Nous y croyons tout est de la part de notre Seigneur ! » Mais seuls les doués d'intelligence s'en rappellent. » Par ce verset, nous pouvons déduire que seuls les littéralistes sont dans la voie droite car :
-
Les gens qui lisent les attributs des versets équivoques à travers une vue absolue ne focalisent pas sur ceux-ci car ils savent que la focalisation sur ceux-ci ne peut qu'engendrer la dissension. En effet, pour eux le texte est incréé et le lecteur créé. La focalisation risque de générer la contradiction résultante de la compréhension relative d'une parole absolue. Cette contradiction ne pourra donc être levée car par l'altération de la signification authentique de la parole divine qui est un crime à leurs yeux.
-
Les gens qui prennent les attributs équivoques littéralement s'en remettent à Dieu et disent « Nous y croyons » ce qui implique que la signification est connue car l'on ne peut pas croire en ce qui n'a pas de sens à nos yeux. Ainsi pour eux, ce n'est que le comment qui est inconnu et que seul Allah connait. La signification est nécessairement littérale car affirmer le contraire revient à remettre en cause la perfection de la révélation puisque Allah et le prophète n'ont pas jugé utile de développer la question du sens de ces attributs équivoques et n'ont pas interprété ces derniers. Soutenir que la signification concerne la signification métaphorique conduit à croire que Allah et son prophète ont voulu nous induire en erreur. Est-ce un autre que le prophète qui va rectifier ce que le prophète n'a pas parachevé ? C'est pourquoi vous trouverez les partisans des sectes issues de ces courants de pensée vénérer leur fondateur au rang de prophète ! Sans savoir qu'une telle attitude est une remise en cause de la révélation et un rabaissement du prophète lui même pour l'élévation d'un homme, parfois égaré, qui a jugé utile de focaliser là où Allah et son prophète nous ont interdit, directement et indirectement par des silences, de focaliser.
A partir de là, vous pouvez déduire que l'attitude d'interpréter les versets équivoques est un égarement car elle découle d'une lecture relative audacieuse dans le sens où celui qui interprète dit inconsciemment à Allah : « Tu ne sais pas ce que tu dis, ô mon Seigneur, il fallait remplacer le mot main de ta parole par pouvoir car tu n'as pas de mains ! » Une langue sert à véhiculer des informations par l'entremise des sens de la parole et de l'ouïe en vue de créer un pont entre deux êtres distants. Ainsi, c'est remettre en cause la sagesse divine de la création de la parole : « Il a créé l'homme, lui a appris à s'exprimer clairement » et surtout la perfection divine que de dire que Dieu s'exprime toujours par des métaphores, qu'il n'a pas jugé bon d'expliquer. A quoi sert une métaphore, si ce n'est à faire accéder à une signification par la beauté. Une métaphore ne sert donc à rien quand notre entendement ne nous permet pas d'atteindre le sens de celle-ci et quand il y a un silence divin à son sujet. Je pense qu'aux yeux de tout le monde : « quelqu'un qui parle et veut dire des choses autrement que par la voie directe et claire est anormal, quand il ne nous fait pas accéder, au final, au sens de ses paroles. » C'est donc par amour pour Dieu et sa pureté, que nous devons poursuivre notre combat contre les ennemis de la littéralité, en ce qui concerne les attributs des versets et récits équivoques car ce sont bien eux, les premiers qui portent atteinte à la perfection divine.
Wa bilahi ta'ala taoufiq
Mahdy Ibn Salah