La reconnaissance est le contraire de l'ingratitude car un verset Coranique énonce : « Souvenez vous de Moi et je vous récompenserai. Remerciez Moi et ne soyez pas ingrats ! » [1] Or dans la langue arabe « l'ingratitude » se dit aussi incroyance (kufr), comme si l'incroyance consistait à séparer dans notre conscience le bienfait de son origine véritable, en plaçant des pouvoirs dans la création. La reconnaissance est donc l'action de grâce qui découle de la prise de conscience de l'exclusivité de la bienfaisance divine. A ce sujet, David invoqua Allah de la manière suivante : « Ô mon Seigneur, comment te remercier quand mon remerciement à ton égard est aussi un bienfait venant aussi de ta part? » « C'est ainsi que tu Me remercies » rétorqua Allah. Ainsi, remercier Dieu consiste à reconnaître son exclusive bonté et utiliser ses dons pour l'obtention de son agrément et non de son courroux ! C'est pourquoi le Prophète priait la nuit à gonfler ses pieds et à mouiller ses joues de larmes, en disant à Aïcha qui l'apostropha de la manière suivante : « Pourquoi pleures-tu ainsi quand Allah t'a pardonné tes péchés passés et futurs? » , « Ne serais-je pas un serviteur reconnaissant...» lui répondit-il. Ainsi, toute l'adoration n'est qu'un remerciement à l'égard de la bienfaisance divine qui, soulignons-le, ne sera jamais à la hauteur des bienfaits. En effet, « Cela n'est pas par nos actes que l'on rentre au Paradis » disait le Prophète mais « par la miséricorde divine. »[2]Et à l'imam Ghazali d'ajouter en guise de protection face aux insufflations sataniques invitant à l'inertie: « mais c'est par les actes que l'on se départage ses degrés. »
La patience, quant à elle, est une station spirituelle indissociable de la reconnaissance car le croyant n'est pas comblé uniquement de bienfaits mais subira des épreuves divines par lesquelles il devra prouver la réalité de sa foi. La patience consiste à consentir à la perte de son âme pour plaire au Seigneur. A ce sujet le prophète disait : « Quelle est étonnante l'affaire du croyant ! Car il y a un bien quelle que soit la situation. En effet, si un bienfait lui parvient, il remercie Allah et c'est un bien pour lui, et quand un méfait l'affecte, il patiente, et c'est encore un bien pour lui. » [3] La patience implique ainsi la résistance face aux élans injustes de l'âme. Patienter et résister sont donc deux synonymes. En cela, nous pouvons dire qu'il existe trois types de patience; « une patience dans l'obéissance, une patience de prémunition par rapport à la désobéissance, et une patience face à l'épreuve du destin. » La patience est donc une station centrale, un peu étrange puisqu'elle se définit par elle même, sans laquelle nous n'avons pas de foi.
Les stations spirituelles de la reconnaissance et de la patience sont donc primordiales car l'adoration n'est en somme qu'une action de grâce, et une opposition à l'âme bestiale ! C'est pourquoi Satan aspire à les supprimer de nos poitrines en travaillant à développer notre ingratitude et notre inconstance, par le placement d'un voile opaque entre Allah et les événements de notre vie, qui nous empêcheraient de voir Allah derrière chacun d'entre-eux.
Mahdy Ibn Salah
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[1] C2/152
[2] Muslim
[3] Muslim