Salam alayka, Excusez moi d’insister et de vous infliger mes soucis au travers de mes mails répétitifs.  Apres Allah, je ne sais pas vers qui me tourner mis à part vous. J'ai besoin d'être conforter quand au comportement que je dois adopter. J'envisage même d'user de moyens qui "ne me ressemble pas" afin de me faire entendre. Depuis prés d'une semaine et petit à petit j'ai retrouvé une relation "normale" avec mon père (sans avoir eu de discussion qui puisse mettre fin à notre désaccord, ou du moins qui nous permet de nous retrouver sans rancœur). Elhamdulilleh! Cependant pour moi, il a réussi à échapper à ses responsabilités. La situation dans laquelle je me trouve risque l'êtreun éternel recommencement... Je me pose des questions quand à mes choix concernant mon futur époux que je dois laisser à mon père, je peine à être optimiste. Je me vois payer les erreurs de mon père et subir le châtiment d'Allah. A coté de ça j’apprécie cette relation retrouvée avec mon père et n'ai pas envie de tout gâcher. Je culpabilise déjà des éventuels problèmes que je peux causer. Éclairez moi s'il vous plait.

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Alaykom salam chère sœur,

Il arrive très souvent de recevoir des messages de sœurs qui sont confrontées à un refus illégitime d’un père concernant une demande en mariage de leur fille. Ce problème est malheureusement récurrent car nous vivons une époque où les critères de choix ne sont plus conformes à la tradition prophétique mais s’inspirent davantage de la culture occidentale, qui a fait de la piété et la religiosité, des critères dépassés…

Les musulmans de France, du fait de leur résidence dans un pays non musulman, ont fini par se dépersonnaliser et ont adopté des valeurs opposées à la morale islamique. Par conséquent, aujourd’hui, on juge un futur gendre par sa beauté physique, sa couleur de peau, sa richesse matérielle, son origine et rarement par des considérations morales, souvent reléguées au dernier rang, voire carrément occultées.

Ma sœur, tu te retrouves confrontée à une situation dans laquelle tu te sens tiraillée entre ta volonté de te marier et ton souhait de maintenir de bons rapports avec ton père qui s’oppose à ton mariage. De peur de créer la fitna au sein de la maisonnée familiale, tu prends beaucoup sur toi pour que les conflits ne fusent pas au quotidien mais ton cœur bouillonne de ne pouvoir vivre ta vie comme tu l’entends, avec tes propres aspirations, malheureusement non comprises par les tiens. Quoi de plus frustrant que de subir une injustice de la part de ses propres parents, qui n’ayant pas été éduqués à l’Islam authentique, s’opposent à un mariage qui pourrait apporter amour et sérénité à leur fille, qui désire seulement à accomplir la moitié de sa foi. Tu te sens ainsi démunie ne sachant que faire pour atteindre ton objectif sans que cela n’abîme ta relation avec ton père.

Selon la législation musulmane, il est vrai que la femme ne peut pas se marier sans l’accord de son tuteur légal mais si ce dernier refuse injustement, elle a le droit de choisir un autre tuteur qui la mariera. Encore faut-il avoir la force de faire un tel choix…

Je comprends parfaitement ta douleur ; et sache que beaucoup te conseilleront sans vraiment saisir l’enjeu d’une telle affaire.

En effet, tu trouveras des personnes, certes dévouées et sincères pour te conseiller, mais dont les conseils se résumeront à :

-          « Je te conseille d’arrêter car cela ne se fait pas de se marier sans ses parents ».

-          «  Je te conseille de continuer pour prouver ton authenticité dans le combat contre le faux et l’injustice ».

Si tu suis le premier conseil, tu seras triste de passer à côté d’un frère qui te correspondait vraiment mais tu finiras par te consoler en te disant que c’est ALLAH qui facilite et qu’il se peut que ce projet, au final, ne soit pas une bonne chose pour toi.

Si tu écoutes le deuxième conseil, c’est à double tranchant; tu pourrais en ressortir forte, comme tu pourrais en ressortir affaiblie. Je m’explique ; il n’y pas de véridiques combats si on occulte de prendre en compte ses capacités, celles de supporter une telle décision, car s’engager dans une lutte sans avoir la force nécessaire pour combattre et supporter les pertes, mènerait nécessairement à la défaite. Et Allah ne nous enjoint-il pas de ne pas nous jeter par nos propres mains dans la destruction ? [1] 

En effet, commencer une vie de couple en quittant le cocon familial dans un contexte conflictuel, n’est pas à la portée de tous car non seulement la soeur perdra tous ses repères en changeant toutes ses habitudes et en devant s’adapter à sa nouvelle vie de femme mariée. Mais devra également subir les conséquences de la cassure du lien avec les membres de sa famille qui auraient pu être un soutien dans cette nouvelle étape de sa vie, qu’elle franchira, finalement toute seule. Cela a de quoi fragiliser en apportant instabilité sur instabilité. Aussi, sur le long terme, tu pourrais t’éloigner de ton objectif premier, celui de te rapprocher de Dieu. En effet, si tu ne supportes pas l’éloignement familial, il se pourrait que cela affecte ta vie de couple et par la même ta relation avec ALLAH car un couple qui connaît une instabilité destructrice, car n’arrivant pas à la gérer, peut finir par s’éloigner du but pour lequel l’homme et la femme s’étaient mariés et même finir par divorcer…

Au final, comprends que tu ne dois laisser personne te pousser à prendre une décision qui occulte tes capacités car tu pourrais finir par le regretter et même en vouloir à la personne qui voulait te conseiller sincèrement. Tu es la seule à connaître ta force, tes aspirations les plus profondes et l’échelle de ta sensibilité, et seule cette connaissance est à même de te permettre d’appréhender les tenants et les aboutissants d’un tel choix.

Il y a des sœurs qui se sont mariées avec l’accord de leurs parents mais n’ont pas supporté la distance du fait de vivre dans une autre ville que celle de leur famille. Alors qu’en serait-il pour des femmes qui, à cause de la douleur du tiraillement, hésitent à se marier en l’absence de leurs parents… Le choix est bien plus difficile et les conséquences beaucoup plus lourdes.

Enfin, tu évoques ta crainte de voir ton père s’opposer sans cesse à tes futurs prétendants. Il est vrai qu’il existe des parents qui refusent systématiquement une demande en mariage, car il se peut qu’ils aient un intérêt à garder leurs enfants auprès d’eux… Il t’appartiendra de comprendre quelles sont les motifs de ces refus répétés. Si le temps confirme tes craintes, celles de devoir subir un refus systématique, alors peut-être que l’injustice répétée te donnera davantage de force pour te marier sans l’accord de ton père car tu prendras vraiment conscience que ce ne sont pas tes intérêts que ton père veut sauvegarder mais égoïstement les siens.

Au final, ta décision ne sera ni contre ton prétendant, ni contre tes parents mais une décision qui respectera ton équilibre et tes intérêts, finalement. Saisis ainsi la nuance ma sœur, car beaucoup, par leurs conseils pourraient te mépriser et te faire croire que tu es faible, si tu prenais la décision d’arrêter à cause de la douleur d’un tiraillement dont tu as choisi de ne pas supporter les conséquences. Tu n’as à convaincre personne de ton choix, si ce n’est te convaincre toi, seulement, en prenant conscience que tu as fait preuve de sagesse en étant clairvoyante sur tes capacités.

Qu’Allah guide ton père et te facilite le mariage.

Raja d’Aix-en-Provence